L’interview de Maître Desmesure est l’occasion de réfléchir au sens du blog et aux règles du jeu. En général. À la mesure de la démesure. Et tous prolégomènes ayant été considérés. Mes réflexions, suprêmes, seront donc partagées avec mon aimable lectorat à la suite de la plaidoirie de Maître Desmesure.
#monanalyse
le 24 JUIN 2021,
L'interview de Me Desmesure (@aniemelnobiche)
Je t’ai posé une dizaine de questions, comme je le fais usuellement pour préparer les interviews et engager le dialogue. Car ce que je nomme « interview » est en vérité un dialogue. Mais en fait, si j’ai bien compris, on s’en fout des questions et de l’ordre supposément important dans lequel elles ont été préparées...
Tu n’as pas choisi de m’interviewer, je n’ai pas choisi de l’être non plus. Briser les chaines, ne m’a jamais impressionnée, (même les chaînes qui promettaient 7 ans de malheur au collège à celui ou celle qui daignerait la briser). Mais je te trouve très sympathique. Et loin de moi l’idée de te menacer mais c’est comme ça, la douceur et la bienveillance peuvent me donner envie de « troller » gentiment.
Je répondrai donc à ma manière et dans le désordre (kestuvafer...)
Mais il y en a quand même une (Me Carminoa) qui, bien que féminine et dont j’aime tellement le courage de ses opinions, va se faire appeler Arthur ou Roger, je ne sais pas encore même si ça n’envoie pas du tout la même énergie ces deux prénoms, le premier intemporel, le deuxième... intemporel aussi, mais sans âge quoi... même si on en revient aux prénoms de nos arrières ou arrières-arrières...
Bref je me permettais juste de m’interroger du pourquoi un prénom si tendance, comme l’est aussi celui de mon fils, alors que, malgré ton apparente jeunesse d’esprit (je vais faire semblant d’ignorer que tu as quand même casé le mot « prolégomène ») tu sembles toutefois né avant 2014...
Alors pour en revenir à l’idée de départ, je répondrai dans le désordre et sans parler de ma vie, mon jean, ma peau et moi (Lou, si tu me lis, c’était pas ta meilleure...) parce que tout le monde s’en fiche et le monde a bien raison. Car entre toi et moi : comme pour tout le reste, je n’attends pas que cela bouleverse ma vie juste qu’on se marre un peu avant « que ce monde ne devienne un grand cimetière », que ca me donne « l’envie d’avoir (encore) envie »… ça génère quelque chose, quoi que ce soit, c’est un peu ça la magie de twitter : tu sais pas ce qui te conduit à lire telle idée qui serait restée enfermée dans son bocal ou à interagir avec tel ou tel être.
Parce que... après vraiment deux ans et demi (ouais ça compte les demi on fête bien les twittanniversaires ici) je me rends compte que je n’obtiendrai pas ce que je suis venue chercher initialement : un vecteur pour lutter contre le projet de loi justice et toutes les réformes que ce gouvernement nous pond détruisant un peu plus chaque fois nos services publics (en ce compris celui de la justice). J’avais obtenu une audience très importante sur FB. Quand je regarde de nouveau la vidéo en cause je me trouve trop « mignonne ». Car il n’y a rien qui ne fera dévier ce gouvernement.
Alors j’ai ensuite décidé de faire comme tout le monde, c’est à dire un grand journal intime public. À la différence près que je n’en attends aucun autre bénéfice secondaire : percer ou se maintenir après avoir percé ou avoir fait gonfler ses abonnements. Je plains franchement les comptes qui n’obéissent qu’à cela , qui ont la liberté de leur audience et l’audience de leur liberté (c’est à dire très peu finalement malgré les apparences) et celle de l’obligation de maintenir cette audience au mépris même parfois donc de l’idée, des idées.
Je crois qu’il y a un moment où tu intègres l’attente de ta ligne édito, consciemment ou pas. Je reconnais que mon objectif plus récent aurait pu s’approcher de la possibilité de tweeter comme Déus au féminin. Ce n’est pas vraiment possible encore en 2021. Pour moi l’un des combats restant passe par la vraie liberté d’opinion et d’expression, celle-là même qui te permet aussi d’écrire des bêtises, j’entends par là dans un registre moins sérieux (je ne dis pas que Deus n’écrit que des bêtises, hein) même quand tu es une femme et même quand tu es avocat.
Sans être taxée de AW, comme peuvent l’être les femmes que j’admire ici parce qu’elles ont la totale liberté de ce qu’elles veulent écrire. Et qui se font suber par d’autres femmes qui la leur envient peut-être tout en se revendiquant représenter l’alpha ou l’oméga du féminisme. Parce que je trouve qu’on atteint les effets pervers du système qui est né d’ailleurs ici, l’étape sans doute nécessaire du meetoo de la libération de la parole…
Mais à l’extrême, sans procès, tout ce qui finit par venir déstabiliser ce en quoi je crois et auquel je continue de croire en épousant cette profession. La Justice, pas la vendetta et le lynchage privé en public, la guerre des sexes en attaquant l’autre et ce en raison même du sexe. Il est plus facile de surfer encore à l’infini sur un système qui conduit finalement à nous opposer les uns aux autres que d’inventer une autre manière d’avancer ensemble dans ce combat qu’est celui la liberté.
Mais je ne sais pas si c’est même possible sur Twitter à cause du format déjà pour commencer : les idées qui doivent tenir en 280 caractères. Tout devient donc binaire. T’es pour ou t’es contre. Je ne crache pas dans la soupe qui me nourrit d’une information cependant riche et stimulante. Je déplore que l’ego vienne altérer la pureté des idées de certains cerveaux sensibles, brillants ici.
Et oui tu as donc vu à juste titre ma colère. Je refuse la manière dont notre société, dont Twitter est le reflet, nous demande de vivre actuellement. Réfléchir le moins possible dans l’analyse et le recul, et ne même pas envisager de « discuter » l’ordre légitime sans se faire traiter de bas du front, complotiste, antivax, anarchiste... (ce n’est pas exhaustif).
Je suis profondément légaliste. Et je ne supporte plus que ce gouvernement déstabilise la boussole, c’est-à-dire nos principes fondamentaux, nos libertés, en pleine tempête et en pleine nuit à l’Assemblée. Et même quand l’objectif poursuivi est celui de la santé (vote en force du pass sanitaire). Qu’on ne se sente même pas autorisé à le tweeter ici sans passer pour une antivax de la part même du cercle (law and justice) me révolte franchement. Alors je continuerai sûrement de gueuler dans ma pièce à moitié vide jusqu’à ce que j’en ai marre de me parler sous cette forme à moi-même.
Car désormais une journée type sur twitter n’est plus de chercher à tweeter pour tweeter mais essayer (je manque de temps en ce moment), outre de capter l’information qui passe à toute vitesse ici, de nourrir toutes les belles relations diverses et variées que j’ai tissées ici ( Q6) dont peut-être la nôtre.
Roger, je te voudrais être le prochain interviewé aux côtés de deux autres personnes à qui j’ai proposé de passer le relai et qui ont déclin, parce que mon humble « mission » de vie et celle que je veux transmettre à mon fils, c’est d’être connectée à la beauté de ce monde via chaque échange qu’offre l’instant présent et le hasard de la vie qui, telle une fleur (je vais me remettre aux #6mots tiens), est si belle et si fragile, encore plus quand elle n’est pas vécue comme elle est appelée à l’être, c’est-à-dire loin de sa vérité, de ce qui la nourrit et la fait s’épanouir au sein de son environnement et avec le reste du monde.
Ça se voit que mes derniers livres (lus en entier, c’est pas gagné, je scrolle souvent) en date sont : Sortir de la croissance et La vie secrète des arbres, non ?
Pour répondre à ta dernière question : j’ai lu La vie secrète des arbres quand il est sorti, un livre très intéressant qui m’a marqué, qui m’a toutefois agacé à un certain moment par l’interminable métaphore anthropomorphique. Je n’ai pas lu « Sortir de la croissance » mais je vois l’idée. Bref, je ne sais pas dire précisément si ça se voit que tu les as lus mais je vois bien l’idée.
À la question initiale « kestuvafer », la réponse est simple : je m’adapte. Il paraît que c’est important de s’adapter. Enfin, les gens le disent. Tu préfères m’envoyer un long texte plutôt que répondre aux questions dans l’ordre où elles se présentent ? Je m’adapte.
Ça me rappelle le cas d’une médecin bien connue de Strasbourg qui avait répondu à une interview dans feu mon web-journal satirique en m’envoyant ses réponses sous forme de DM à l’époque où les DM étaient limités à 140 caractères. On avait bien ri.
On loupe juste mon projet sous-jacent d’un dialogue mais l’humaine condition s’en remettra, de même que nous. C’est aussi ça, l’adaptation.
Je suis suprême, je propose des règles du jeu. J’ai des habitudes, des rites. J’aime les cadres et j’ai besoin d’encadrer les choses que je réalise. La transgression du cadre est toutefois permise, ça doit être ça la frontière entre le rigoriste et le psychorigide. Et puis une règle que l'on s'est imposée mais à laquelle on ne déroge jamais, c’est un peu chiant. Je me demande même s’il n’est pas dans la nature de la règle d’être dérogée. J’imagine que mes règles portent en elles une espère de principe de dérogabilité à la Karl Popper.
Pour finir, je ne suis pas d’accord avec ta première phrase.
Je n’ai pas eu à choisir de t’interviewer. Quand je demande à mes interviewés de recommander de futurs interviewés, c’est librement que je le fais et que j’offre la liberté de me répondre, ou non. Et ça n’aurait aucun sens de critiquer ou décliner la ou les personnes qui sont ainsi recommandées. Tu ne peux pas dire que je « n’ai pas choisi » parce que je me suis mis en dehors de tout choix. Et par la suite, je ne force personne. Ma règle du jeu est très simple : si la personne recommandée ne me contacte pas ou si ça ne l’intéresse pas, il n’y a pas d’interview.
Tu as choisi librement de donner suite à la recommandation de Maître Carminoa, et je te remercie pour le temps que nous a ainsi offert.
Je m’adapte c’est-à-dire je respecte la liberté de chacun. Ton bon plaisir était de répondre d’un bloc et ta réponse est plaisante à lire ? Parfait. Je chéris ta liberté et la fais mienne. Pour cette fois-ci.
C'était l'interview de Me Desmesure (@aniemelnobiche)
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