Plutôt que de résumer l'interview de Thierry, ma prescription sera simplement d'inviter les millions de lecteurs du blog suprême à la lire. Tout de suite. Voilà.
#monanalyse
le 25 JANVIER 2023,
L'interview de Thierry Vimal (@VimalThierry)
Pour en savoir plus :
CHRONIQUE DU PROCÈS DE L'ATTENTAT DU 14 JUILLET 2016 À NICE | Thierry Vimal
Bonjour Thierry, qui es-tu ? Où vas-tu ?
Je suis Thierry Vimal, 51 ans, écrivain est celle de mes pratiques qui ressemble le plus à une activité professionnelle.
Quand j’essaye d’aller vers un gros objectif, en général j’échoue, c’est pourquoi plus je vieillis, plus je me laisse porter. Il est vrai que depuis le décès de ma fille à l’été 2016, c’est devenu moins dangereux.
Mais non tu n’es pas vieux. Tu es plus jeune que moi, c’est dire.
Alors ça, ça me bouleverse. Je ne m’y attendais pas du tout. Tu n’aurais pas dû me le dire : ça va changer grandement mes réponses.
C’est le risque du dialogue qui fait apparaître la vérité lors du débat 🤷🏻♂️
Dommage que ça marche pas en procès d’assises.
Faut pas rêver non plus.
C’est la première fois que j’interviewe une personne ou blogueur dont la page « à propos » se trouve sur Wikipédia.
Une page où l’on apprend que tu es ceinture noire quatrième dan d’aïkido, que tu as obtenu une licence de psychologie à 37 ans et un CAP de cuisine à 50 ans. De tous ces talents, lequel t’est le plus utile au quotidien ?
Le talent de cuisinier m’est vraiment utile au quotidien : première activité de procrastination pour fuir le bureau d’écriture. Je n’irai pas jusqu’à dire que passer le CAP ait été « utile ». La psycho, ça peut toujours servir, hein. Quant à l’aïkido, avec tous les amis que j’ai dû me faire dans ma chronique du procès (politiques, accusés, avocats...), va savoir si je ne vais pas lui trouver bientôt une utilité toute premier degré.
La psychologie j’en connais qu’une : défourailler le premier, comme disait l’autre. Même si nous dénonçons la violence, bien sûr.
Je suis le premier partisan de la défouraille. Faut voir comme mon écriture y réussit.
Tu t’es aussi présenté, récemment, dans une vidéo de l’Agence régionale du livre Provence-Alpes-Côte-d’Azur. Tu y dis qu’après l’attentat, il était « nécessaire » de revenir au métier d’écrivain.
ArL Provence-Alpes-Côte d'Azur
À la question bateau que je ne pose jamais « pourquoi écris-tu ? » (ma réponse habituelle : « bah pour que tu me lises »), tu proposes donc pour ta part un état de nécessité. Qu’est-ce que l’écriture soigne en toi ?
Écriture, cuisine, aïkido : en prise direct avec le réel, pour le transformer en quelque chose d’humainement hautement élaboré, pour faire valoir sa réalité... Jouer entre l’alpha et l’omega, parce que tout ce qui se balade dans la grisaille intermédiaire ne peut qu’entraîner ma chute. J’ignore si l’écriture me soigne quelque chose, mais ne pas écrire me rendrait chaque jour un peu plus mort que la veille.
Réponse qui prouve la pertinence suprême de ma question qui ne n’est pas moins, suprême. L’écriture soigne de la mort, c’est désormais prouvé par l’exemple #monanalyse
Et l’écriture de tweets ?
L’écriture de tweets passe le temps et permet de faire quelques rencontres inoubliables. L’écriture de tweets, c’est la vie, en somme.
Revenons à toi : c’est quoi la journée type d’un écrivain tel que toi ?
7h30 : lever et promenade du chien à la colline du Château de Nice. Échauffourées avec les agents ASVP de la police municipale qui surveillent qu’on les garde bien en laisse. Café brioche sur un banc avec d’autres mamies à chien comme moi.
Travail (écriture tant qu’à faire, administratif), déjeuner à midi pile tellement j’ai faim, une heure de sieste puis douche tellement j’ai froid, premières pistes de réflexion quant au menu du soir.
Travail (écriture tant qu’à faire, administratif) jusqu’à ce que, n’y tenant plus, j’emmène le chien faire des courses pour le repas du soir, désormais défini dans ses grandes lignes, mais qui évoluera encore selon marché.
Travail (écriture tant qu’à faire, administratif) en alternance avec cuisine, jusque vers 18 heures.
Alcoolisme jusqu’au dîner.
Dîner devant la télé sans rien comprendre à ce que je vois : éviter donc de gâcher fils et série de qualité, les réserver pour des temps meilleurs.
Semaine sans garde de ma fille : idem mais moins d’énergie consacrée au dîner.
Procès : assister chroniquer voyager dormir et manger mal.
Ah tiens, des ASVP ? Je croyais qu’à Nice les caméras de vidéoprotection (comme on dit de nos jours) suffisaient à garantir la tranquillité de nos concitoyens jusqu’à la maîtrise des effets désastreux des canines déjections.
Il FAUT dire vidéoPROTECTION. Rien n’illustre mieux l’efficacité de ces caméras, qui filmèrent en nombre la dizaine de repérages du camionneur de la Prom (cette rue où les gros camions sont interdits.)
Dans la vidéo dont je parlais tout à l’heure et que j’ai élégamment insérée dans le blog suprême, tu présentes ton dernier livre, « Au titre des souffrances endurées », comme un manuel de survie pour parents endeuillés face au parcours juridique, aux problèmes économiques… qui les attendent.
Présenté comme ça, il ne fait pas trop envie, ce statut de parent endeuillé. Tu confirmes qu’il vaut mieux ne pas souffrir en plus de phobie administrative ?
Je confirme d’abord que parent endeuillé, en effet, est un statut que je déconseille. Ça ne fait pas le bonheur, l’envie de gambader dans les champs fleuris est salement amochée et ça draine son lot de complications, dont les administratives. Surtout si la mort de l’enfant est liée au terrorisme.
On nous avait dit de tabler sur une dizaine d’années, ça semble être raisonnable. Il y a l’indemnitaire, le pénal, les parcours de soin, le retour au travail... Et moi j’ai eu droit à un bonus médecine légale.
Un bonus ? Mais c’est merveilleux, ça, un bonus 🤗
Un petit supplément d’emmerdements que nous nous efforçons de refiler au Parquet National antiterroriste et à l’Institut médicolégal de Nice.
👎🏻
Tu as créé un blog, « ça passe crème », que tu sous-titres « Chronique obscène, révoltée, lyrique, blasphème, irrévérencieuse – poétique en somme – (et tristement la seule) du procès de l’attentat du 14 juillet 2016 à Nice (Paris, 2022) ». Ça aussi c’était pour répondre à un état de nécessité ?
Il était malhonnête de dire que ma chronique était la seule : le travail de Robert McLiam Wilson pour Charlie Hebdo relève aussi véritablement de la chronique. En me lançant dans la mienne, j’imaginais qu’on serait plusieurs à adopter ce type de « positionnement » (c’est le mot le plus exact que j’ai trouvé pour expliquer ce que ça représente pour moi... « Attitude » n’est pas mal non plus).
Ah ? Il faudrait être honnête quand on écrit ? Je ne connaissais pas cette contrainte... c’est nouveau ?
Il faut ESSAYER d’être honnête AVEC SOI-MÊME.
(Violons).
(L’instrument de musique, pas le verbe).
Mais sinon tu peux piller toutes les idées des imbéciles qui en ont de bonnes et les laissent perdre.
(Une pensée amicale à tous mes vieux potes.)
Oui bien sûr, c’est beau, les violons.
Je reviens à ton blog. En le découvrant lors de la longue et méticuleuse préparation de ton interview, je me suis demandé un moment pourquoi tu qualifiais ta chronique du procès d’obscène et puis je crois avoir trouvé avec ce billet que tu as titré « Rions un peu : sondage » :
J’ai bon ?
Je viens de lire la définition de « obscène » : « Qui offense le bon goût, qui est choquant par son caractère inconvenant, son manque de pudeur, sa trivialité, sa crudité ». C’est bien sous cet angle que je souhaitais aborder le procès de l’attentat du 14 juillet 2016. Comme tu le pointes finement en me renvoyant vers mon match sondage Estrosi / Castex, je ne suis pas le seul à être obscène.
Alors, que tu sois dans la crudité, je ne le nie pas, et comme tu le disais à l’instant, on t’imaginait mal gambader dans les champs fleuris vu la circonstance.
En revanche, mon « obscène » n’était pas un génitif subjectif mais objectif : j’ai seulement trouvé de l’obscénité dans les propos de ces messieurs dont tu rappelles le nom. Parce qu’il faut bien donner un nom aux choses, sinon le malheur du monde, tout ça tout ça...
Oui, moi, c’est de la fausse obscénité, portée par de la fausse modestie. Eux c’est autre chose.
C’est @Virginie_Le_Roy qui a recommandé que tu sois interviewé dans le blog suprême. Que faisais-tu quand tu as appris cette merveilleuse nouvelle ? Quels ont été tes sentiments ?
J’étais en train de « stalker Master the King », autrement dit, de surveiller l’activité en ligne de mon avocate Maître @Virginie_Le_Roy qui, parfois, s’égare à travailler d’autres dossiers que le mien. Bien sûr, quand je découvris qu’elle me recommandait au blog suprême, j’eus honte de ma suspicion, et versai quelques larmes de gratitude. Gratitude aussi à l’égard du meurtrier-de-la-Prom’, qui fit du minable écrivain que j’étais, un de la trempe du blog suprême.
C’est beau ce que tu dis. Surtout ces mots si bien choisis concernant ma trempe.
Lors de son interview, j’ai demandé à Virginie « qu’est-ce qu’un procès devrait être ? » en référence au procès de l’attentat du 14 juillet 2016 à Nice. Et pour toi ? Qu’est-ce qu’un procès, et surtout celui-là, devrait ou aurait dû être ?
Bend your knee et écoute la sainte parole du Seigneur qui me fut transmise pendant les débats.
« Rendre la justice est au-delà des moyens des hommes. Et pourtant, d’instinct ils la veulent, et ils ont l’obligation morale d’essayer. »
Donc, je dirais, un procès est une tentative de justice. Quoi en attendre ? Que l’approximation soit acceptable. Le procès de l’attentat du 14 juillet a été à mon avis d’une dignité exemplaire, principalement grâce à son président – mais-pas-que. Je dirais donc qu’il a été... le mieux qu’il pouvait. Il a fait de son mieux.
À ton tour, à qui souhaites-tu de connaître la joie céleste d’une interview dans le blog suprême ?
Puisque je l’ai déjà évoqué, puisque je lui voue une reconnaissance extrême car un écrivain de sa stature s’est penché sur notre procès et sur ma modeste (autant qu’un Maître Roger) personne, et surtout parce que, quand je lui demande si je peux le citer comme proposition pour le Blog Suprême, il répond « Cite-moi tant que tu veux : je vis que pour ça », eh bien, ce sera Robert McLiam Wilson.
J’ai l’impression qu’il n’est pas sur Twitter : je fais comment pour le contacter ? Je ne vis qu’à travers Twitter, moi...
Mais tout le monde doit s’abonner à son compte @Parisbob2001 !
Ah, parfait. Je n’imagine pas qu’il en soit désormais autrement #monanalyse
Tout le monde s’abonnera et l’heureux nommé me contactera en DM pour connaître la procédure complexe et néanmoins sécurisée pour être interviewé dans le blog suprême.
Parlons un peu de moi, si tu veux bien. Depuis que tu connais Maître Roger, comment ta vie a-t-elle changé ?
En mal. On est toujours naïf quand on rencontre des Maîtres de haut esprit, on pense qu’ils vont nous entraîner dans leur sillage, mais non, ça ne marche pas comme ça, il faut les côtoyer des années, s’imprégner de leur présence, alors seulement, on commence à s’élever... un peu. Jamais à leur niveau, bien sûr. Je n’en suis qu’aux premiers temps de fréquentation, je tombe déjà de haut, le nez dans ma médiocrité, en mesurant le chemin à parcourir.
Bon bon bon... alors autant j’apprécie la flagornerie et la positionne très, très haut dans mon Panthéon des rapports interpersonnels de qualité, surtout quand j’en suis l’objet... autant en l’espèce tu n’en ferais pas un poil trop ? 🤔
C’est pour lancer la question suivante.
Ah oui, évidemment. Malin. La voici donc : et si Maître Roger était un génie (enfin il l’est déjà mais c’est une autre histoire) et te permettait de changer deux choses à ta vie, et à la vie des gens, quelles deux choses choisirais-tu ?
Bien sûr, je récupèrerais une chère défunte de douze ans, et ça compterait pour les deux vœux. Je ne toucherais pas à la vie des autres : je te parie qu’au bout du compte ils me feraient la peau. Mais Maître Roger n’est pas un génie bleu de lampe à huile, c’est un génie du tweet.
Rajoute moi deux cent mille followers, merci.
Qu’il en soit ainsi 🙏🏻
Tu n’ignores pas que la publication de ton interview va bouleverser ta vie et te faire entrer dans le star system, désormais suivi tel Forrest Gump par des centaines de fans. Comment te prépares-tu à cette nouvelle vie ?
Je viens de m’acheter un stérilisateur à conserves, il ne me manque plus qu’une cuisine digne de ce nom dans une maison à la campagne, avec un jardin d’hiver pour l’écriture, et personne ne saura où me trouver, je refuserai les interviews, comme un Salinger en plus gras, plus productif et moins génial.
Avec tout l’argent qui rentrera, je remplacerai mon stérilisateur par un autoclave, je construirai un fumoir à saucisses et ferai creuser dans ma propriété quelque chose entre la mare au canards et la piscine à débordement, pour nager nu parmi les grenouilles.
Je t’inviterai.
Grande est mon impatience.
Où souhaites-tu dîner avec Maître Roger quand tu seras une star ?
Sur une de ces tables en bois des aires d’autoroute, pour lui faire goûter mes pâtés en conserve. A moins qu’il ne m’invite à l’Arpège chez Passard.
Vu le bonheur que tu m’offres avec ton interview : faisons les deux.
Hormis les questions inspirantes de Maître Roger, qu’as-tu lu de particulièrement remarquable ces derniers temps ? D’ailleurs, ça lit de la littérature, un écrivain ?
J’ai tellement rédigé de modes d’emploi que c’est devenu ma littérature préférée. J’adore comparer les styles, les talents, les approches de mes anciens confrères-et-sœurs. Si tu en as dans tes fonds de tiroir de cuisine, même anciens, je suis preneur. Sinon les présentations produits, pas mal, mais j’exècre les clichés, tels que « piles non fournies ». Grosse nostalgie du catalogue de La Redoute, surtout le dernier tiers. Pendant les trois mois de procès, rien pu lire, pas pu tenir jusqu’à la fin d’un film ou d’un épisode de série. Maintenant, je lis un livre sur les dépouilles mortelles dans la culture.
Je ne connaissais absolument pas ce kink des modes d’emplois. ça tombe bien, j’interviewe prochainement un psychiatre, je lui demanderai ce que nous devons en penser, si ça ne te dérange pas...
Quelle musique as-tu écoutée pour répondre à cette interview ?
« Laisse les gondoles à Venise », Sheila et Ringo, principalement pour les vers « on va se faire des œufs au jambon / du pain grillé du café chaud ».
Je rajoute ce kink à l’interview du psy 😳
Quelle image choisis-tu pour illustrer ton interview ? Tu expliqueras ton choix en 3 parties.
C’est à mes chroniques du procès Prom14 que je dois l’honneur d’être interviewé ici. Elles furent illustrées grâce à deux banques d’images gratuites.
Sur l’une d’elles, je viens de taper le mot « chronique ». Ne me demande pas pourquoi ce canard est sorti, mais j’en ai presque pleuré de joie. Il s’est mis au vert et je vais faire de même (raison deux), et enfin (raison trois), laqué, il est le plat préféré d’une grande fleur de la Lune que je connais bien.
Mon dieu le croiras-tu, partageons-nous quelque gémellité cosmique ? Je viens seulement de voir ce canard sur ta page Twitter ! Je maintiens mon choix, je fais même de ça ma raison 4.
Non je t’en prie, appelle-moi Roger, tout simplement. Mon dieu, ça me fait rougir à chaque fois.
Tu as collaboré (selon Wikipédia) au magazine Ressources. Et les tiennes, de ressources, dans tout ça, on en parle ou c’est tabou ?
Allocation Adultes Handicapés, allocs logement. Droits d’auteur proportionnels à ma renommée (dans les 45 euros par an). De petits jackpots quand je signe pour un livre, pas souvent donc. Un peu de côté « grâce » à la mort de ma fille, pour monter un projet professionnel supposé me faire vivre mieux et plus dignement. Le mag Ressources parlait de ressources naturelles... Tu m’interrogeais peut-être sur mes ressources physiques et sexuelles ?
Voyons, Thierry 😳
C'était l'interview de Thierry Vimal (@VimalThierry)
Pour en savoir plus :
CHRONIQUE DU PROCÈS DE L'ATTENTAT DU 14 JUILLET 2016 À NICE | Thierry Vimal
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